De Fertód à Bratislava (étape 51)
28/05/2024. La journée débute par un copieux petit déjeuner. Le cyclotouriste a un appétit gargantuesque le matin car il sait ce qui l’attend une fois sa tasse de café vide. Je glisse une phrase de remerciement à la responsable de la pension au moment du départ. Je l’ai répété dix fois avant de la lui dire. En vain. Elle me regarde, l’air effaré. Ma prononciation du hongrois rend incompréhensible ma phrase. Nous reprenons la route. Un vieil ami s’invite avec nous : le vent. Malgré tout, l’étape se révèle formidable. De longues routes bien balisées, quasiment exclusivement empruntées par des cyclistes, déroulant des kilomètres sur de vastes plateaux agricoles. La journée s’inscrit de nouveau dans le sillage des précédentes, à ceci près que nous quittons la Hongrie pour l’Autriche afin de rejoindre la Slovaquie. Nous fleurtons aujourd’hui avec les frontières tracées en Europe centrale.
C’est par le Burgenland, l’un des neuf länders autrichiens, que nous rejoignons la Slovaquie. Il s’observe une certaine continuité des paysages avec le comitat du nord-ouest de la Hongrie. Les plaines agricoles prédominent. Peut-être pouvons nous observer une plus grande variété des cultures : betteraves, petits pois, fleurs. Par ailleurs les vignes sont prédominantes. À ceci s’ajoute l’exploitation d’un immense parc éolien, que nous avons contourné une bonne partie du trajet.
Bien que nous soyons parti depuis deux mois et demi, que nous ayons franchi environ 4000 kilomètres et traversé trois pays différents, le vieu pap’ n’a toujours pas compris qu’il ne peut pas mettre son casque sur son chapeau! Les pédagogues le disent tous : apprendre réclame du temps.
Les aires de repos avec des tables de pic-nic ne sont pas rares dans les villages hongrois et les petites villes autrichiennes que nous avons traversées jusqu’alors. Entre 12h et 14h, c’est le même rituel qui se répète. D’abord le repérage d’une épicerie pour faire les courses. Ensuite, le repérage de l’aire de picnic. Enfin, la dégustation des mets.
Nous voici enfin arrivés en Slovaquie et à Bratislava, sa capitale. Elle jouxte la frontière avec l’Autriche. Au loin, le château de Bratislava est visible. . Demain, nous resterons une journée pour la visiter avant de reprendre la route pour Vienne.
Visite de Bratislava
Petite dégustation de mets locaux. Pour le vieu pap’, un bon goulasch hongrois avec sa viande de boeuf et son paprika. Et pour moi, un bon goulasch de Szeged au porc et au chou vinaigré. Des plats qui réchauffent et qui rassasient.
De Bratislava à Vienne (étape 51)
30/05/2024. C’est un jour férié aujourd’hui en Autriche. Le pays à majorité catholique commémore la Cène. Nous quittons la Slovaquie sous un soleil de plomb. Nous lançons un ultime regard en direction de la tour de télévision du mont Kamzík qui surplombe l’agglomération. Nous gagnons le Land de Basse-Autriche en passant par la région viticole de Weinviertel. Les routes cyclistes sont parfaitement balisées. Nous nous en délectons. Nous gagnons le district de Gänserndorf et atteignons la ville de Deutsch-Wagram, dont le nom a été immortalisé par les guerres napoléoniennes. Nous nous y arrêtons pour déjeuner. Nous commandons ein Schnitzlersemmel und Bohnensuppe. Nous repartons, rassasiés.
À l’approche de Vienne, un craquement au niveau du pédalier de mon vélo. J’entends un second craquement une fois arrivée à Vienne. Dans les rues, la chaîne se met subitement à sauter à chaque coup de pédale. Nous posons le pied au sol et étudions la situation. De prime abord, la chaîne semble distendue. Les dents du pédalier apparaissent par ailleurs usées. De nouveau, une intervention technique s’impose. Au même moment, une goutte. Puis plusieurs. Coup du sort, une pluie lourde s’abat sur nous. Je ne peux plus passer le second plateau. Je dois ralentir. Heureusement, le camping est proche. C’est donc sous un temps maussade et avec problème technique que cette étape s’achève. Demain, je partirai à la recherche d’un vélociste. En espérant que ça ne soit pas trop grave…
Après moult recherches, je trouve enfin un vélociste en mesure d’intervenir. Le problème est sérieux. La chaîne est fortement usée, de même que mon pédalier et ma cassette de vitesses. Le tout est à remplacer. La chaîne aurait dû être remplacé depuis longtemps. À force, elle a endommagé l’ensemble. Ce nouvel incident me sert de leçon. Pour l’heure, j’observe la transmission des savoirs entre le mécanicien et son apprenti en situation. Le modèle dual germanique !
Séjour à Vienne
Un moment décisif. Nous achetons deux billets pour le musée Sigmund Freud, situé au 19 Bergasse. C’est ici où le professeur vécu et créa la psychanalyse. Malgré la symbolique du lieu, le musée nous déçoit. Trop généraliste et peu fourni. Le vieu pap’ dénonce le ‘fetichisme du maître’ à travers l’exposition de ses effets personnels.
Le grandiose et fastueux château de Schönbrunn. La résidence des familles impériales d’Autriche.
Je ne pouvais pas laisser le vieu pap’ sur une note de déception après notre visite du musée Sigmund Freud. Il fallait réagir. Je me devais de réenchanter tout ça. C’est pourquoi il était de mon devoir de lui offrir les chaussettes Sigmund en taille 44. Les dimanches de marché ne seront plus les mêmes maintenant. Les brestois n’ont qu’à bien se tenir.
De Vienne à Wolfpassing an der Hochleithen (étape 52)
03/06/2024. Échanges houleux ce matin avec le réparateur cycle. La facture est excessivement salée et les explications ne me satisfont pas. J’obtiens une ristourne mais je quitte la boutique avec un profond ressentiment. Le départ de Vienne est tardif. Nous entamons notre route à midi alors que notre destination est à plus de quatre vingts kilomètres. Depuis le nord de la capitale, nous rejoignons la Dampfross und Drahtesel, une ancienne voie ferrée reliant Vienne depuis la gare de Stammerdorf jusqu’à Deutsch-Wagram dans la Basse-Autriche. De nombreux cerisiers griottes bordent la voie verte. Nous cueillons les précieux fruits qui sont à portée de main. Passés Wolkersdorf, nous rejoignons une route vallonnée qui flanque un sérieux coup de barre au vieu pap’. Nous stationnons à plusieurs reprises afin qu’il récupère. Dans un village, nous avalons une soupe d’haricots dans un bistroquet tenu par un drôle de gars.
Le vieu pap’ est visiblement mieux. Nous sommes à cinquante kilomètres de notre destination. Le ciel se fait menaçant au moment de repartir. Nous pensons pouvoir esquiver l’orage en face de nous, mais nous avons torts. Le vent conduit la masse nuageuse droit sur nous. Des éclairs éclatent de part et d’autre dans le ciel. La foutre s’abat dans les champs, au loin. Le tonnerre gronde. Je ne suis pas rassuré. Un nouveau village en approche. Nous restons dans un abribus en attendant une éclaircie. Des trombes d’eau se déversent soudainement. Nous sommes provisoirement bloqués. Face à nous, les pompiers s’affairent. Le risque d’inondation est élevé. La sirène assourdissante est déclenchée à plusieurs reprises. La pluie est incessante. Nous comprenons que nous n’atteindront pas la Tchéquie aujourd’hui. Nous trouvons un petit appartement à trois kilomètres. Nous nous y rendons. En chemin, une biche traverse la route sous nos yeux.
Un aperçu de la pluie diluvienne qui s’est abattue sur nous. Dans ce genre de cas, le meilleur allié est la patience.
0 Comments